Adhérer aux monnaies locales complémentaires et citoyennes et les mettre en place dans les services publics de la commune et de ses groupements, dans les budgets participatifs et dans le soutien aux associations.
Cette fiche technique à été réalisé avec l’aide d’Andréa Caro du mouvement SOL, de Charline Ducottet du Galléco et de Jacques Sarda de Krôcô & Nîmes en Transition
source : https://www.pacte-transition.org/#mesures
Contexte et Enjeux
Notre système monétaire actuel se caractérise par deux points clés : la monnaie est essentiellement créée par le crédit bancaire et le système monétaire est monopolistique (la production de monnaie est contrôlée par un nombre restreint d’acteurs, et principalement par la BCE). Imposé partout dans le monde, ce système monétaire « simplifié » facilite les échanges entre agents sans limite de temps ni d’espace. Cependant, il se révèle être en opposition avec les dynamiques écologiques plus complexes : le système monétaire est en continuelle expansion alors même que l’environnement et les ressources naturelles sont des ressources finies. Il n’existe pas de relation entre la sphère réelle et la sphère monétaire. Cette conception dichotomique de l’économie n’intègre pas alors les dommages environnementaux dans le système des prix des biens et services (Dominique Plihon, 2017). Pour inverser cette tendance et relocaliser l’économie, de nombreuses monnaies locales on vu le jour en France depuis 2011 et la création de l’Abeille à Villeneuve-sur-Lot.
Aujourd’hui, il existe 73 monnaies locales complémentaires (MLC) en circulation en France et plusieurs autres sont en projet. Elles sont complémentaires, car elles n’ont pas pour objectif de remplacer nos monnaies conventionnelles (comme l’Euro) mais bien de les compléter. Elles sont également des outils de mobilisation citoyenne et d’éducation populaire. De part leur renforcement des productions locales, les MLC permettent aussi de rendre un territoire plus résilient. Elles ont aussi une vocation sociale et solidaire car elles visent à créer de la valeur sociale. Beaucoup de monnaies sont des MLCC (Monnaie locale complémentaire et citoyenne), car leur création et leur pilotage sont le fait de collectifs citoyens et non des collectivités territoriales.
Depuis la loi du 31 juillet 2014 relative à l’économie sociale et solidaire (ESS), les monnaies locales disposent d’un cadre légal permettant leur développement : en plus des échanges entre consommateur·trices et commerçant·es, il est désormais possible de payer des services publics locaux (piscine, transports en commun…) avec une MLC. Ce nouveau cadre offre la possibilité aux collectivités locales de dépasser le rôle de seules pourvoyeuses de subventions et d’amplifier la dynamique locale Les monnaies locales prennent aujourd’hui de l’ampleur et beaucoup ont la volonté de s’organiser collectivement. Ainsi, lors des dernières Rencontres nationales du Réseau des MLCC (regroupant une cinquantaine de monnaies), il a été adopté le principe faisant de tout adhérent·e d’une MLCC un·e adhérent·e de fait de toutes les autres MLCC lui permettant, lors de déplacements, de se procurer des coupons de monnaie locale, sans adhérer directement à l’association gestionnaire locale. Cette disposition est également adoptée entre les monnaies du réseau SOL.
Niveaux
1 Soutenir et financer l’association qui porte la monnaie locale de votre territoire afin de lui permettre de mieux consolider le projet et/ou le développer
2 Adhérer à l’association porteuse pour encaisser des paiements et accorder des subventions en monnaie locale pour des projets territoriaux innovants et/ou valorisant une politique affectée (transition, consommation responsable, santé et alimentation saine, cohésion sociale, formations à l’économie sociale et solidaire…)
3 Payer une partie des indemnités des élu·es / salaires des agents municipaux, et des aides sociales en MLC
En pratique
La réussite d’un projet de monnaie locale passe par une forte appropriation et implication des acteurs locaux et des citoyen·nes. Ces projets sont portés par des associations de l’économie sociale et solidaire dédiées. Le soutien des collectivités locales est un «plus» souvent décisif : il peut s’agir d’un simple soutien matériel (prêt de salles, mise à disposition de matériel etc.) ou de l’attribution de subventions spécifiquement fléchées pour la mise en place de ces monnaies. Près des deux-tiers des projets déjà existants sont ainsi appuyés par les pouvoirs publics locaux. Pour développer l’utilisation de la monnaie locale sur le territoire, les collectivités peuvent payer une partie des indemnités d’élu·es et/ou une partie des salaires des agents municipaux dans cette monnaie, et proposer des aides sociales (parfois bonifiées) en MLC via les CCAS (Centres Communaux d’Action Sociale). Pour pouvoir augmenter leur potentiel et améliorer leur circulation, plusieurs monnaies locales se dirigent aujourd’hui vers des outils de transaction numérique. Plusieurs solutions techniques sont en cours de développement, adaptées aux différentes tailles de MLC.
Pour accepter la monnaie locale et complémentaire, la collectivité territoriale doit :
1 Adhérer à l’association porteuse en qualité de prestataire de services (délibération du Conseil municipal ou communautaire, et agrément de l’association porteuse de la monnaie)
2 Signer une convention avec l’association prévoyant entre autres les encaissements dans une ou plusieurs régies
3 Transmettre la convention au ou à la responsable du Trésor public et adapter le règlement de la Régie
Arguments
Les monnaies locales et complémentaires :
- Favorisent les entrepreneur·ses de l’économie sociale et solidaire, et de proximité.
- Valorisent les richesses du territoire en intégrant un indicateur de richesse co-défini (PID)
- Soutiennent les initiatives de Transition écologique et citoyenne et améliorent la résilience des territoires face aux crises.
Idées reçues
« J’achète déjà local, donc pas besoin de MLC »
Les MLC ont un double effet grâce à la mise à disposition d’un fonds de garantie dans une banque qui peut l’investir dans des projets de transition. Les MLC circulent plus vite entre les mains des citoyen·nes et commerces locaux et créent plus de richesses.
« les MLC ne sont pas sécurisées et peuvent être falsifiées »
En pratique, aucun cas de falsification n’a jamais été recensé. La plupart des monnaies ont des coupons qui ne peuvent pas être reproduits lors d’une impression standard.
« les MLC ne sont pas légales »
Elles sont reconnues légalement par la loi du 31 juillet 2014.
Ces communes qui l’ont déjà fait
- Eusko (Communauté d’Agglomération Pays Basque et 17 communes adhérentes) : Piscines, centres des loisirs, cantines, garderies, études, places de marché,… Les élu·es de certaines communes ont demandé à recevoir les indemnités en MLC et des subventions sont versées aux associations en monnaie locale.
- Bou’Sol (Boulogne-sur-Mer) : Transports, crèches, bibliothèques.
- L’Élef : Chambéry : Musée, cité des arts, médiathèque. La-Motte-Servolex : bibliothèque et salles de spectacles.
- SoNantes (Nantes) : Sont payables en SoN les services parapublics (gestion par des SPL sous trésorerie privée) suivants : transports, Voyage à Nantes (OT), MIN, ExpoNantes, Cité Congrès, Salle Lieu Unique.
- Vendéo (Vendée) : Droit de places, médiathèque, restaurant scolaire, location de matériel, recettes diverses.
- Le Retz’L (Agglomération Nantaise) : Droits de place, piscine, salles, site de loisirs, salle de spectacles de la ville de Bouguenais.
- Le Cairn (bassin de vie grenoblois) : Sur trois collectivités locales adhérentes (Grenoble-Alpes-Métropole, Ville de Grenoble et Ville de Tullins) possibilité de payer la piscine, Musée de Grenoble, Self du personnel, Médiathèques, Métrovélo (service métropolitain de location de vélo), places de marchés, transports en commun (Semitag), événements (Rencontres du Cinéma de Montagne ; Forum des Associations…). La Ville de Grenoble peut également payer les indemnités d’élus, les rémunérations du personnel, les subventions aux associations et les factures des fournisseurs. Expérimentation en janvier 2019 en partenariat avec le CCAS de Grenoble d’abondement de 20 cairns supplémentaires sur les aides sociales facultatives. Discussions en cours avec Eaux des Grenoble et Gaz et Electricité de Grenoble pour le paiement des factures d’énergie.
D’autres soutiens de la part des collectivités en France ?
- Le Sol-Violette (Toulouse) : Première collectivité à s’engager à la co-création d’une monnaie citoyenne avec les Toulousain·es, financement du projet, prêts de locaux, soutien à la consommation saine des plus précaires avec les maisons des chômeur·ses (30 Sols pour 120 familles par mois pour découvrir l’ESS), affectation (via une subvention affectée pendant 5 ans). Paiement des transports en étude.
- La Gonette (Lyon) et l’Élef (Chambèry) : Affectation via “OSCAR » – Comité d’établissement de la Région à l’action sociale : au lieu des chèques-cadeau traditionnels de fin d’année, il est proposé d’affecter la consommation pour des achats locaux et responsables via les monnaies citoyennes.
- La Roue (Région Paca et Grand’Avignon) : Soutien financier aux monnaies locales du territoire (La Roue).
- La MEL (Lille) : pour un étude à la création d’une monnaie locale et citoyenne
Ressources
SITES WEB :
ARTICLES :
- Institut Veblen, Monnaies complémentaires, un nouvel outil au service des territoires, 2018
- Ademe, Les monnaies locales complémentaires environnementales, 2017
- Jérôme Blanc, Marie Fare. Les dispositifs de monnaies locales en quête de ressources : entre expéri-mentation et modèles socio-économiques, 2017